
AGUA music 2025/Inouïe Distribution
Quentin Dujardin nous revient avec de nouvelles mélodies imparables et une énergie de feu portée par une génération de musiciens que l’on ne présente plus: Didier Laloy, Nicolas Fiszman & Manu Katché. Chacune de leurs apparitions laisse une trace indélébile aux couleurs universelles dans le coeur du public.
Produit par Lee Townsend, ce nouvel album SAISON ORANGE est dédié à cette guitare discrète dont les cordes nylon dessinent des espaces infinis. Peindre des paysages reste en effet une addiction pour Quentin Dujardin. Sa traversée dans l’exploration de l’instrument reflète son goût inchangé pour l’aventure, une forme de dévotion quasi religieuse: un lien vers sa propre intériorité et celle qui le relie à son public.
Le guitariste confirme aussi son attirance pour les envolées lyriques comme en atteste notamment l’invité de ce disque, le trompettiste norvégien, Mathias Eick. Pour clôturer ce disque, il ouvre la porte du cover avec cette reprise dépouillée du titre ‘L’Enfer’ de Stromae.
Quentin Dujardin est un instinctif dont la prise de liberté semble sans fin. L’artiste cultive ce goût du risque pour ré-inventer son propre univers musical, aussi pour fuir l’encombrement d’être catalogué. SAISON ORANGE marque un tournant dans la discographie du guitariste qui nous parle de cette “cinquième saison”: celle dont la nature se pare entre l’hiver et le printemps; celle de ces champs pesticidés autour de son village et rendus orangés sous l’effet de l’homme pour assurer l’illusion d’une meilleure survie.
~
« C’est le troisième album sur lequel je travaille autour de la musique du guitariste et compositeur Quentin Dujardin. Il y a quelques années, j’avais eu le plaisir de réaliser ‘Distances’ et, l’année suivante, son projet blues ‘Kalaban Coura’, un subtil mélange avec la musique malienne. Dans les deux cas, la musique était emplie de fraîcheur et d’originalité mais aussi ambitieuse quant à sa portée tout en restant simplement belle. Elle démontrait une promesse certaine pour l’avenir.
Treize ans plus tard, cette nouvelle opportunité s’est présentée à moi avec ce dernier album du guitariste en version quartet cette fois-ci autour de l’indomptable section rythmique de Manu Katché (batterie) et Nicolas Fiszman (basse), ainsi que de l’accordéoniste et coloriste extraordinaire Didier Laloy. Les compositions de Quentin, réalisées par ce groupe de collaborateurs merveilleusement constitué, ont en effet révélé le genre de promesse accomplie dont on ne pouvait que rêver au début des années 2010. Ce fut une chose remarquable et excitante à observer. Leur présence à chacun a porté la musique de Quentin et mis en valeur son jeu étonnant.
J’ai eu le privilège de travailler avec bon nombre de guitaristes/compositeurs brillants au fil des ans. Le travail de Quentin et son processus créatif ont montré qu’il avait sa place parmi ce club innovant de ces illustres musiciens. Je me sens privilégié d’avoir été invité à collaborer avec lui pour faire connaître cette musique au monde. Et je pense qu’elle est plus nécessaire que jamais. »
Lee Townsend, Berkeley, Californie, Mars 2025
| PRESSE |
« Mis en relief par une production lumineuse de Lee Townsend, Saison Orange arpente les territoires du rêve à travers neuf instrumentaux d’une grâce persuasive. » – Jazz Mania (BE)
« Une guitare éblouissante, des mélodies implacables, des grooves lancinant, une atmosphère ensorcelante » – Le Soir (BE)
« Splendide album, peut-être son meilleur… » – Jazz Rhône-Alpes (FR)
« L’artiste ne fabrique pas seulement du beau et de l’émotion, il a aussi un certain engagement politique partager. » – Q.D. dans Jazz Mania (BE)
« Quentin Dujardin brille de mille feux avec sa guitare nylon » – Jazz’Halo (BE)
**** Le Soir, Novembre 2025 (BE) – chronique par Jean-Claude Vantroyen
Cet album est sans doute une nouvelle étape pour le guitariste belge Quentin Dujardin. L’amorce, avec Epiphytes, est terriblement accrocheuse, avec le riff de basse de Nicolas Fiszman, la guitare éblouissante de Quentin, l’accordéon coloriste de Didier Laloy et la batterie indomptable de Manu Katché. Avec, en prime, pour ce premier morceau, la trompette aérienne de Mathias Eick. Une mélodie implacable, un groove lancinant, une atmosphère pop jazz envoûtante. Les chansons qui suivent ne déçoivent pas. L’atmosphère reste ensorcelante, comme l’osmose des quatre musiciens et les compositions, toutes de Quentin. Cet album vient marquer la belle carrière du guitariste belge d’une pierre blanche : on s’y sent encore mieux que dans ses précédents opus. Si l’album a été enregistré chez lui, aux Avins-en-Condroz, il a été mixé à Berkeley, aux Etats-Unis, et produit par Lee Townsend, qui a travaillé avec Scofield, Frisell, Loudon Wainwright III, Dave Holland et Marc Johnson, ce qui n’est pas rien. Cinq morceaux en quartet, quatre en solo, tous possèdent une sonorité incroyable et tous sont à savourer, sans aucune modération.
Jazz-Rhone-Alpes.com, Décembre 2025 (FR) – chronique par Michel Clavel
Inclassable
Album après album, notre ami belge Quentin Dujardin ne cesse de s’affirmer comme un peintre sonore, égrenant ses compos atmosphériques comme autant de tableaux impressionnistes inspirés des éléments naturels et des paysages qui l’entourent. Par la résonance magique de ses cordes nylon, ce virtuose de la guitare croisant jazz, baroque et musique du monde nous ouvre à chaque fois des espaces infinis. A l’instar de son compatriote accordéoniste Didier Laloy, apprécié sur leur bien nommé Water & Fire (2019) où il était déjà question de saison printanière (Avril, Mai, Juin,…), puis sur le post-covid 2020 qui dévoila un quartet de choc, puisque les deux compères y sont désormais encadrés par l’une des pairs rythmique les plus ébouriffantes et enviées qui soit, avec Manu Katché aux drums et Nicolas Fiszman à la basse [Ndlr: Manu jouait déjà sur Catharsis, précédent album de Quentin avec le pianiste Ivan Paduart, où c’était alors Richard Bona à la basse.]
C’est donc ce fabuleux quartet qui nous revient aujourd’hui avec Saison Orange, produit par le californien Lee Townsend (réputé pour son travail avec les plus grands guitaristes, c’est sa troisième collaboration avec Quentin Dujardin), et que le compositeur naturaliste définit comme une cinquième saison. Entre hiver et printemps, celle où les champs qui entourent son paisible village se parent d’un reflet orangé sous le triste effet des pesticides qui leurs sont administrés à cette époque.
Epiphytes (signifiant qui croit sur une autre plante) entame la déambulation sur une ligne rythmique pop-rock et trace une fresque impressionniste où la clarté des cordes ouvre des paysages oniriques, avec en feat. le grand trompettiste danois Mathias Eick (Manu Katché, Lars Danielsson, Vincent Peirani,…) dans un dialogue vaporeux avec l’accordéon.
La Croisière avec son tempo plus blues-rock, nous évoque plutôt une chevauchée des plaines du mid-west, avec un souffle d’accordéon qui se substitue à un harmonica. D’équidé il est justement question avec Janette sur son cheval, titre bien dans l’esprit d’une chanson folk, douce perle de guitare solo avec un tricot classique et une mélodie qui tient de la broderie, tendre et élégante. Elle prend des couleurs plus flamenca en affirmant son caractère dans un joli croisement de cordes avec la basse sur le titre éponyme Saison Orange. Sur près de six minutes, elle sera plus légère et guillerette pour le bien nommé Douce avec son groove tranquille sur une ligne de basse toujours virile.
Mais si Argile, proposé à nouveau en guitare solo, a la pureté bienfaitrice de son titre le temps d’une plage atmosphérique et contemplative, les loups sortent du bois quand arrivent Septembre, la bombe de la rentrée avec sa rythmique nettement jazz-rock et des attaques basse-batterie qui envoient bien comme on aime !
Dans l’esprit d’Argile, Vivace fait malgré son titre un retour vers l’apaisement avec une guitare alanguie, avec des cordes grinçant sous les doigts dans un jeu d’obédience classico-baroque (rappelons qu’on entend par ailleurs Quentin sur ce créneau avec le violoncelliste Matthieu Saglio dans l’ensemble Résonance du contre-ténor Samuel Cattiau). Avant de clore ce splendide album – peut-être son meilleur – par une mélodie qui d’emblée nous semble déjà connue. Et c’est bien normal, puisque cette seul reprise (instrumentale) est celle de L’Enfer de son compatriote Paul Van Haver, plus célèbre sous le pseudo Stromae, artiste qui comme lui partage un regard écoresponsable et inquiet sur cette planète.
Jazz Mania, Décembre 2025 (BE) – entretien avec Jean-Pierre Goffin
~ Quentin Dujardin n’aime pas la Saison orange ~
Quentin Dujardin : J’ai l’habitude de passer d’une formule minimaliste à une formule plus grande. Le précédent album était un duo avec Olivier Ker Ourio, juste guitare et harmonica sans overdub. Le quartet est le quatrième album qu’on fait dans une formule plus élargie, j’aime beaucoup parce que ça me permet d’étendre plus l’idée du groove, de mettre en évidence des mélodies portées par des grooves. De plus, une rythmique avec Nicolas et Manu (Fiszman et Katché – NDLR) c’est exceptionnel, ils apportent de la simplicité, de l’efficacité dans le portage de la musique. Ça magnifie des mélodies qui sont en réalité très simples, il n’y a pas de difficulté à les jouer. J’ai un peu fait le nettoyage dans ce jazz qui peut être parfois un peu cérébral, un peu trop égocentrique. J’essaie de rendre la musique plus partagée vers le public et cette formule est extraordinaire pour ça : on est très heureux d’être dans cette énergie, dans cette simplicité mélodique, et c’est un grand plaisir de jouer ensemble, d’être content de se retrouver. C’est important pour moi aussi de mettre quelque chose qui reste dans l’oreille des gens, de clarifier le message musical.
Une formule qui ouvre la porte à l’improvisation.
Q.D. : Les mélodies sont une excuse pour laisser de la place à une improvisation qui n’est pas nécessairement complexe, mais qui est l’image d’un son qui reste. Ce que j’aime dans le jazz, c’est la notion de liberté, de ne pas être placé dans une case. J’ai beaucoup d’admiration pour Bill Frisell qui est dans cette démarche vers un public, avec le sens du partage. Ma musique a toujours été très simple dès le départ.
Et elle permet de modifier les formules : tu présentes aussi la musique de cet album en concert en duo avec Nicolas Fiszman, avec Didier Laloy…
Q.D. : Exactement. J’ai toujours considéré que le travail en studio est radicalement différent du live. Je me pose toujours la question de savoir si la musique enregistrée en studio est jouable seul, et c’est oui, tout part d’une guitare. On n’est pas tenu à la création qui est gravée sur un disque. On est libre, c’est le champ de création du jazz. Et les musiciens avec qui je joue comprennent ça : Nicolas par exemple a trente, quarante ans de studio derrière lui, et il comprend le son en live pour le partager avec le public.
C’est d’autant plus vrai quand tu reprends un « standard » qui est déjà dans les oreilles du public : je pense évidemment à « L’Enfer » de Stromae.
Q.D. : Je n’avais encore jamais ouvert la porte à un standard… Beaucoup de guitaristes le font et les gens attendent ça. C’est quelque chose qui ne m’attirait pas. Ce qui s’est passé ; c’est que j’ai fait la musique d’un documentaire qui parle de la santé mentale, « Tout va s’arranger, ou pas », qui parle des conséquences du covid sur les jeunes entre 13 et 18 ans. Ce documentaire m’a marqué, dans une cause que je ne connaissais pas vraiment, celle de ces jeunes perdus par l’isolement à cause du covid, par la médication qui n’était pas toujours adaptée à leur pathologie. Le réalisateur Pierre Schonbrodt m’a juste dit que j’avais carte blanche pour la musique, mais qu’il souhaitait que je reprenne à ma façon le titre « L’Enfer » de Stromae qui parle de la santé mentale. Je connaissais sa performance en direct au journal télévisé en France, un moment d’anthologie au-delà de la musique pour faire passer le message. J’ai repris le morceau avec ma guitare baryton avec une prise de son novatrice, des octaveurs qui « détunent » certaines cordes mais pas d’autres, ce qui donne un spectre énorme au morceau à deux guitares qui est quasiment symphonique. J’ai proposé à Lee Townsend de le reprendre sur le disque : il est américain, il ne connaissait pas la chanson et a proposé qu’on l’intègre dans l’album. Quand on le joue en live, on explose le thème tout en le jouant de façon monastique, c’est-à-dire avec les règles de reconnaissance du thème extrêmement simple avec un côté baroque.
D’où vient le titre de l’album « Saison orange » ?
Q.D. : J’observe que dans nos campagnes condruziennes, belges et aussi partout en Europe, il y a une cinquième saison, entre la fin de l’hiver et le début du printemps, une saison orange. Alors que le paysage redevient vert, que les bourgeons sortent, il y a tout à coup une couleur orangée sur des centaines d’hectares de façon très géométrique qui provient du traitement par l’homme des plantations par des pesticides, le traitement des pommes de terre notamment. Cette couleur qui n’appartient pas à la nature m’horrifie : on sait aujourd’hui que la percolation dans nos sols est maximale et entraîne les résidus de ces pesticides dans le sol. On sait de façon évidente que nos nappes phréatiques sont polluées par des produits qui arriveront dans des multinationales. L’assujettissement de notre nature, la beauté de notre paysage, le jour où ça ne fonctionnera plus, que notre terre sera morte, ces sociétés partiront ailleurs sans s’encombrer des dégâts sur nos terres. L’artiste ne fabrique pas seulement du beau et de l’émotion, mais a aussi un certain engagement politique à partager. Tout ça a été longuement mûri dans mon esprit, ça m’est apparu suite à mon concert interdit dans l’église de Crupet (NDLR pour rappel : jazzmania.be), et je me suis rendu compte que je pouvais avoir une portée politique qui pouvait avoir un impact sur les gens et faire bouger les lignes dans ma petite mesure. Tout le monde devrait être sensibilisé par ces problèmes.
Il y a des éléments plus réjouissants dans ta musique, il y a la famille.
Q.D. : Il y a deux morceaux pour mes filles : « Douce » et « Janette sur son cheval ». Un des paradoxes d’être musicien, c’est la difficulté de concilier son métier avec la vie de famille, avec les voyages, les concerts, des moments complètement décalés. Ecrire des morceaux en pensant à mes proches, c’est un moyen de penser à eux, à ce que je laisse comme trace. La musique a un pouvoir sur le temps et sur le lien sensoriel. La musique a une puissance par rapport à ça. C’est un paramètre très important dans ma musique, associer une personne à ma musique.
C’est le cas de Didier Laloy.
Q.D. : Didier est citadin à la base, il a migré depuis trente ans dans le Condroz. On est très proche pour l’amour de la campagne, elle nous rapproche de nos musiques.
Associer batterie, guitare acoustique, accordéon, basse électrique, un challenge ?
Q.D. : Il n’y a pas de règle. Ce qui compte, c’est la perspective qu’on donne dans le son, faire un mélange qui apporte quelque chose. Mêler une guitare acoustique avec la batterie de Manu Katché qui claque, il y a une dichotomie totale au point de départ, alors qu’en réalité c’est justement ce contraste-là avec le son doux d’une guitare nylon : tout est dans l’art d’affiner le son, le travail de studio, c’est là que ça devient intéressant, inattendu.
Et en live ?
Q.D. : Tout l’art, c’est celui de l’ingé-son qui donne autant de puissance par rapport à une batterie. La question est d’être dans la même cour et de jouer de la même manière qu’eux. C’est un travail long sur le son et qui a trouvé l’équilibre que je cherchais depuis longtemps.
Jazz’halo, Décembre 2025 (BE) – chronique de Stephen Godsall
Le guitariste et compositeur belge Quentin Dujardin publie des albums depuis 2002 et compose également des musiques de film. Pour ce nouvel opus, il a réuni un groupe de rêve avec Manu Katché à la batterie (connu pour ses collaborations avec Jan Garbarek, Sting et Peter Gabriel), Nicolas Fiszman à la basse électrique (ayant travaillé avec Alphonse Mouzon, Joe Zawinul et Trilok Gurtu) et son collaborateur régulier Didier Laloy à l’accordéon diatonique. Son nouvel album s’articule autour de ce titre SAISON ORANGE, « ce disque nous parle de cette “cinquième saison”: celle dont la nature se pare entre l’hiver et le printemps; celle de ces champs pesticidés autour de son village et rendus orangés sous l’effet de l’homme pour assurer l’illusion d’une meilleure survie ». Une belle idée, certes, mais la musique évoque davantage le printemps plutôt que l’hiver : rhapsodique et harmonieuse. Le style de Dujardin fait un usage brillant des arpèges et les compositions se développent de manière organique plutôt que de suivre une structure « thème-solo-thème ». L’interaction et le dialogue entre les instruments sont d’une grande fluidité. Le morceau d’ouverture, « Epiphytes », met également en vedette le trompettiste visionnaire norvégien Mathias Eick et bénéficie d’une énergie communicative portée par une section rythmique exceptionnelle et une mélodie puissante. Bien que la plupart des morceaux de l’album soient composés par Dujardin, il se fait discret et se met au service de la musique. Le deuxième morceau, « La Croisière », le met en valeur à la guitare slide expressive, en interaction harmonieuse avec l’accordéon sur un titre funk entraînant. Puis, « Janette sur son cheval » présente un solo de guitare, avec un son intimiste capté au plus près du micro, qui explore toutes les nuances. Le morceau éponyme déploie toute la puissance du quatuor, dans une composition raffinée qui met en lumière l’improvisation collective. « Douce » combine guitares acoustique, électrique et slide dans un contrepoint aéré, soutenu avec inventivité par les trois autres musiciens. « Argile » est un magnifique duo pour deux guitares en tempo libre, avec des mélodies et des harmonies exploratoires qui fusionnent, une fois de plus, composition et improvisation. Le morceau percutant et rythmé par les riffs de « Septembre » présente un jeu à l’unisson saisissant entre guitare, accordéon et basse, évoquant Chick Corea, et s’épanouissant dans un registre plus électronique pour son apogée. La batterie est particulièrement réussie. « Vivace » débute également par un solo de guitare impressionniste ; des arpèges changeants et évocateurs introduisent progressivement une ligne mélodique à la guitare électrique. L’ensemble met en valeur la technique impeccable de Dujardin à la guitare fingerstyle et son approche créative de l’harmonie. Le dernier morceau est une version de « L’Enfer » de Paul Van Haver/Stromae pour ensemble de guitares et piano. L’alternance entre les enregistrements du groupe et les pistes de guitares séparées contribue à la richesse de l’album. Il s’agit d’un album abouti, composé de morceaux de grande qualité interprétés par des musiciens chevronnés, avec Quentin Dujardin qui brille de mille feux à la guitare nylon.
Jazz Mania, Décembre 2025 (BE) – chronique de Pierre Dulieu
Avec son tourbillon de poussière orange qui semble surgir de la guitare, la photo en couverture intrigue. L’auteur la relie aux teintes prises par la nature à la fin de l’hiver dans sa région du Condroz, tout en évoquant, dans une sensibilisation salutaire, l’utilisation intensive d’herbicides. Voici donc, porteur d’un message, le nouvel album du guitariste Quentin Dujardin qui l’a enregistré en compagnie de l’accordéoniste Didier Laloy, du bassiste Nicolas Fiszman et du batteur Manu Katché.
Dès le premier titre, « Epiphytes », on se perd dans une forêt ombrophile aux arbres couverts de mousse et de lichen. Sur une pulsation lancinante, la trompette magique de Mathias Eick s’élève puis se déploie avec éloquence, diffusant un parfum d’air humide et traduisant en notes la majestueuse splendeur végétale. « La Croisière », qui vient ensuite, entraîne l’auditeur sur la mer profonde que fend un frêle esquif poussé par les glissandos d’une guitare jouée en slide. La richesse des mélodies est au cœur de ces musiques douces, dépourvues d’affectation, de prétention ou de démesure, qui dessinent inlassablement des paysages hachurés par une rythmique d’une immense précision et finement colorisés par l’accordéon de Didier Laloy. Les cordes en nylon de la guitare procurent un surcroît de douceur aux phrases fluides et élégantes. Sur des compositions comme « Saison Orange » ou « Douce », le dialogue entre les deux instruments solistes crée des superpositions de couleurs comme dans un tableau impressionniste. L’ambiance générale du disque est lyrique, sereine, voire introspective mais toujours chaleureuse. Et quand le tempo se fait un rien plus vif, comme sur « Septembre », l’harmonie musicale demeure intacte et continue de faire surgir des images fortes.
Mis en relief par une production lumineuse de Lee Townsend, Saison Orange arpente les territoires du rêve à travers neuf instrumentaux d’une grâce persuasive.